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vendredi, 02 août 2013

LOST GIRL : Au Pays des Faes, et des Succubes... Premier avis sur la Saison 1.

Nous vivons une époque où c’est plutôt la disette, malheureusement, en terme de séries fantastiques. C’est pourquoi, quand une d’entre elles se présente, et plaît autant à quelques sériephiles dont l’amie Nephthys (http://nephthysseries.hautetfort.com/), on se doit au moins d’y jeter un oeil…

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De quoi ça parle ? (le pitch de la série) :  Bo est une jeune Succube élevée par des parents adoptifs humains dans la complète ignorance des traditions de son peuple, les Fae (terme générique qui inclut à peu près toutes créatures issues du Petit peuple). En fuite depuis des années, incapable d'assumer son “mode d'alimentation” (elle se nourrit de l'énergie sexuelle des humains, causant leur mort car elle n'a pas appris à maîtriser ce don), elle finit par entrer en contact avec la société des siens. Celle-ci est divisée en deux camps : la Lumière et l’Ombre. Bo refuse de choisir un camp, malgré qu'elle soit devenue très proche de Dyson, un lycanthrope de la lumière, qui s’est pris également d’affection pour elle, et veut veiller à la protéger. Elle reste donc neutre et, installée comme détective privé, elle intervient dans des affaires liées aux deux camps, avec l'aide de sa partenaire : Kenzi, une jeune humaine aux tendances kleptomanes, qu’elle a recueillie. Toutes deux s’apprécient beaucoup, et sont comme des soeurs. (source : Wikipedia)

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Les Raisons de succomber à la belle Succube… ou pas ! (mon avis critique sur le début de la Saison 1) :  LOST GIRL est une production canadienne à l’origine, datant de 2010 (même si l’écriture de son pilote remonte à 2008), une série de genre fantastique / fantasy urbaine avec des saisons assez courtes (13 épisodes pour la 1ère), qui présente de nombreuses caractéristiques du courant littéraire de la Bit-lit : une héroïne forte et indépendante, liée au monde fantastique et à différentes créatures inquiétantes (Vampires ou Loup-garous, en général… ). L’héroïne en question est Bo, une Succube, qui se prend d’affection pour une jeune fille un peu paumée, Kenzi, qui va devenir son side-kick (ou co-équipière), d’une certaine manière. Disons-le tout de suite, le point fort de la série tient en ses personnages, que l’on a plaisir à retrouver. Ils sont vite attachants, même si assez traditionnels au départ. D’ailleurs on retrouve un peu tout l’éventail de possibilités : l’ami flic, l’ami scientifique, le barman chez qui on peut venir chercher des infos, etc… Mais si les personnages ont l’air de correspondre à des stéréotypes, ils sont écrits de façon sérieuse au point qu’on n’y pense pas. L’alchimie entre eux fonctionne assez bien, et on a surtout la présence de Ksenia Solo, qui livre une interprétation déjantée de Kenzi, magnifiant le personnage. C’est simple, cela faisait longtemps que je n’avais pas eu un tel coup de coeur pour un personnage ! L’art et le don de transformer un personnage assez classique, finalement, et pas forcément intéressant à la base en un atout et de le faire briller sont dûs pas mal à Ksenia. De par la nature même de Bo, une Succube qui se nourrit de la force vitale des victimes qu’elle séduit, la série possède un autre atout, un côté très sexy dû à son héroïne, la sculpturale brune Anna Silk, à l’indécente beauté. Un côté sexy d’autant plus que Bo est bi-sexuelle, capable de succomber autant à des charmes masculins que féminins. Ce côté sexy est traité la plupart du temps sous le biais de l’humour. D’autant plus que la plupart du temps, Bo est sous couverture dans ses enquêtes et va jouer de son physique pour parvenir à ses fins.

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La série partage donc quelques qualités communes avec certaines séries (que j’affectionne particulièrement) : Buffy, the Vampire-Slayer, Xena the Warrior-Princess ou encore… ALIAS. Elle avait donc de grandes chances de me plaire. Le Pilote développe dès le début un univers mythologique cohérent, avec ses propres règles, qui ne demande qu’à être exploité ou développé. C’est simple, LOST GIRL possède le charme des séries des années 80 ou 90 en faisant principalement reposer son intérêt sur ses personnages avant tout. (Ainsi, je pense beaucoup également à Highlander, en la regardant. Bo serait un peu l’équivalent de Duncan, et Kenzi Richie, toutes proportions gardées bien entendu). Car le relatif point faible de la série, ce sont ses intrigues, dont j’ai dû mal à me souvenir après avoir vu les épisodes. Là encore, on est parfois en terrain connu : Bo n’a plus trace de ses parents, apparemment morts, mais il se pourrait que ce ne soit pas le cas. Ce qui n’est pas dommageable en soi, finalement : bon nombre de séries de qualité ont eu pour la plupart des intrigues parfois faibles. Ce point est plus critiquable quand une série affiche avec prétention vouloir être une des meilleures séries S-F, comme DEFIANCE. LOST GIRL, elle, propose un divertissement honnête et très sympathique, avec des comédiens incarnant avec charme et justesse leurs personnages, sans prétendre révolutionner le genre. Mais c’est déjà beaucoup : on passe un très bon moment devant la série, et c’est déjà beaucoup.

En bref :  LOST GIRL est une très sympathique série, un divertissement très honnête et de qualité, ce qui est appréciable pour une des rares séries fantastiques à l’heure actuelle. Reposant avant tout sur ses personnages, attachants et séduisants, elle a le charme de certaines séries  des années 90, et est à découvrir quand on est amateur du genre.

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lundi, 15 juillet 2013

DOLLHOUSE : Secondes pensées à l'issue de la Saison 2.

Le Challenge Séries 2013 m’a donné l’occasion de terminer Dollhouse, dont je n’avais pas visionné la Saison 2. De ce fait, une nouvelle note de réflexions sur la série.

eliza dushku, echo, joss whedon, victor, sierra, adelle dewitt, olivia williams, buffy the vampire-slayer, identité

Dollhouse, à bien y regarder, présente quelques points communs avec Buffy the Vampire-Slayer. Mais aussi, bien sûr, plusieurs différences. Dans les 2 séries, on a une héroïne belle et forte en vedette, entourée d’un ensemble de personnages l’aidant, sous la supervision d’une autorité d’origine britannique. C’était le cas d’Anthony Stewart Head, et de son personnage Rupert Giles, et c’est le cas d’Olivia Williams, interprète d’Adelle DeWitt. Mais les ressemblances s’arrêtent là. Si Buffy était une jeune fille plus ou moins libre assumant ses propres choix. Echo est prisonnière de la Dollhouse, et de la volonté de ses maîtres et de ses clients, qu’elle doit servir comme ils le souhaitent, avant de préparer la révolte des Dolls. L’univers de la série est davantage ancré dans la réalité, et les armes à feu ne sont plus prohibées, dans cet univers. Dollhouse est une série beaucoup plus sombre et désenchantée que son aînée, qui est après tout l’histoire de prostituées, les Dolls, ou Actives, au service d’une mère maquerelle, Mme DeWitt. Une série qui aborde d’autres thématiques, la plus philosophique qu’aura créé Whedon jusqu’à présent. Elle témoigne d’une société où les êtres sont prisonniers d’une grande solitude, et prêts à payer ou abuser d’autres êtres vivants pour combler un manque. Nourrir une fantasy. Un rêve, un fantasme. Un état de fait dérangeant, que le relatif soin accordé aux Dolls vient dédouaner : après tout, elles ne souffrent pas (elles ne sont pas censées en souffrir, théoriquement), et ne garderont aucune trace de leurs moments monnayés, puisque leurs souvenirs sont effacés. Le propos s’avère assez pessimiste sur notre société. Même Adelle DeWitt, pour nourrir un besoin purement physique, et Topher, le scientifique responsable du processus, abuseront du procédés pour combler un manque dans leur existence.

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Dollhouse, c’est, et ça m’est apparu lors du visionnage de la saison 2, une glorification du corps. Les Dolls ne sont que des coquilles vides, sur lesquelles viennent se greffer plusieurs personnalités, au besoin du client ou de la mission du jour. Le corps que l’on soigne, que l’on entretient : les Dolls font régulièrement du sport, prennent des douches, afin de prendre soin de leur corps. Puisqu’on les vide de toute trace de leur personnalité passée, que reste-t-il sinon des corps, qui gardent toutefois la trace, la mémoire de ce qu’ils subissent, peut-être. Un corps, et non pas une personnalité, qui finit par obséder, qui pousse le désir de possession jusqu’à l’obsession. Qu’est-ce qui motive véritablement Ballard, dans sa quête de vérité sur la Dollhouse ? La noble quête d’un chevalier blanc, avide de faire tomber une société pratiquant une forme d’esclavage moderne, ou un désir purement égoiste de retrouver une belle jeune femme brune, Caroline, dont il serait tombé amoureux ? Une jeune femme qu’il ne connaît pas réellement, hormis par son apparence physique. On se plaira, dans la série, à envisager une possible relation entre deux des Dolls, Victor et Sierra. Tous deux semblent attirés l’un par l’autre. Mais cette attirance ne peut reposer sur leur personnalité, puisqu’ils n’en possèdent pas de propre. Cette attirance intervient également lorsque les 2 Actives sont en mission, avec une personnalité qu’on leur a greffé. La seule explication vient du fait que c’est le corps qui garde trace de l’attirance, et que l’attirance est d’abord et avant tout purement physique entre les 2 personnages. Le corps est également glorifié dans les multiples combats et démonstrations de force que la série prodigue : les affrontements physiques, les combats sont beaucoup plus fréquents et nerveux dans la saison 2. L’affrontement physique, par 2 fois, sera le moyen par lequel s’exprimeront Paul Ballard et Echo, l’un face à l’autre. Dans le premier, il s’agit de leur première rencontre. Pour le second, la scène est tout d’abord trompeuse : les 2 se déshabillent, et on pense naturellement, que c’est pour faire l’amour. Mais l’on se trompait : les deux s’étaient mis à l’aise pour s’entraîner au combat. Et ce n’est pas grave, car on peut se dire que l’affrontement physique est une autre forme d’expression du corps. On avait déjà remarqué une certaine forme de violence chez Ballard lorsqu’il couche avec une autre femme, Mellie. Est-ce parce qu’il ne tenait pas vraiment à coucher avec elle, mais acceptait de lui donner ce qu’elle voulait, lui reprochait-il inconsciemment de ne pas être Caroline ? La série semble donc valoriser le corps, finalement. Après tout, que sont les acteurs sinon des corps, réceptacles de personnages, personnalités qu’ils endosseront, selont le bon vouloir d’un démiurge, créateur ? Et nous-mêmes, ne sommes-nous pas d’abord et avant tout d’abord attirés par le corps de l’autre ? Lorsque l’on aime une actrice ou un acteur, n’est-ce pas d’abord le corps que l’on aime, puisqu’on ne connaît pas véritablement la personnalité de la personne. Faut de la connaître intimement ? Et pourtant, la série peut se montrer ambiguë, puisque dans le même temps, elle présente le corps comme une coquille interchangeable, une seule et même personnalité peut après tout se retrouver dans un autre corps. Et lorsque c’est le cas, rares sont les fois où la personnalité souhaite à toute force récupérer son corps de départ.

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Dollhouse est en tout cas une série qui présente donc, mine de rien, plusieurs niveaux de lectures, qui offre bien des pistes de réflexions philosophiques si on veut s’en donner la peine. C’est pour cela que l’on ne pourra que saluer et applaudir l’audacieuse diffusion de M6, qui s’est aperçue qu’elle avait toujours la série dans ses cartons, et qui l’aura proposé lors de l’été 2013 à l’horaire du mercredi matin, sur les coups de 1h50 (!!) du matin, en plein milieu de la nuit.

Côté Cast :  La saison 2 offre plusieurs guest-stars de séries que l’on se plaira à reconnaître et retrouver : Jamie Barber et Michael Hogan, le temps d’un épisode chaucun, qui furent 2 des acteurs de Battlestar GALACTICA (2003). On retrouvera ensuite 2 acteurs liés à d’autres séries de Whedon : Alexis Denisof, l’interprète de Wesley Windam-Price dans Buffy the Vampire-Slayer et Angel, et Summer Glau, qui a participé aux distributions régulières de Firefly et TERMINATOR : The Sarah Connor Chronicles.

dimanche, 14 juillet 2013

Buffy, la semaine spéciale "Buffy Memories", Jour-7 : une présentation de la série par David Dunn.

     Pour clôturer cette semaine spéciale Buffy, j’avais imaginé une dernière note sur l’épisode détesté. Mais finalement, il n’y a qu’un épisode que vraiment je déteste, c’est le 6.12 “Double Meat Palace” : Buffy se retrouve obligée de travailler, et devient employée dans un fast-food. Un épisode stupide qui propose une charge gratuite contre ce type de restaurants, souvenir de galère des scénaristes. Mais finalement, il n'y a pas vraiment de matière pour rédiger une note complète. Il aurait fallu, de plus, que je me refasse l’épisode, et je n’y tiens pas ! Du coup, je termine “Buffy Memories” d’une autre manière, plus originale.

J’ai choisi de republier ici, sur ce blog,  un texte écrit il y a de nombreuses années par David Dunn, un sériephile rencontré sur les forums Mad Movies et Next Avalon (aujourd’hui disparu, hélas), à la belle plume lui aussi, et grand admirateur du travail et des séries de Joss Whedon. Contacté il y a peu, il a gracieusement accepté que je republie son texte à l'occasion de cette série de notes rendant hommage à l’une des meilleures séries offertes par la télévision américaines. Et je l’en remercie encore une fois. Un texte synthétique destiné à présenter toutes les qualités de la séries, mais aussi un texte de combat, destiné aussi à défendre la série contre ceux qui en auraient encore une vision biaisée, parcellaire, et refuseraient de la prendre pour ce qu’elle est, une Grande, une immense série.

 

     S’il existe une série incroyablement sous-estimée en France, c’est bien Buffy Contre Les Vampires. Victime de nombreux préjugés, celle-ci se retrouve très souvent cataloguée au même niveau qu‘un Charmed (donc extrêmement bas) et est très peu regardée dans notre beau pays. Parce que beaucoup de spectateurs ne font pas l’effort de dépasser leurs idées préconçues, souvent basées uniquement sur un titre volontairement parodique, Buffy Contre les Vampires, probablement l’une des séries les plus intelligentes à ce jour, est considérée comme idiote par un large public, qui ne la comprend pas.

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Or, pour comprendre réellement ce qu’est Buffy, il faut connaître le mot-clef de la série : Métaphore.
Contrairement à ce que pensent certains fans, la majorité du grand public n’est pas du tout conscient de l’aspect hautement métaphorique de la série. Car grâce aux vampires, aux monstres, au fantastique, Joss Whedon, le créateur/producteur/scénariste principal de Buffy the Vampire-Slayer, souhaite parler de la vie en général. Mais sans les clichés habituels dans le paysage télévisuel américain (ou autre). En effet, Buffy traite de la "vraie vie", avec justesse et finesse. La série et ses personnages évoluant réellement avec les années, les différentes épreuves (physiques, mais surtout psychiques) qui jalonnent la fin de l’adolescence et le début de l’âge adulte y sont matérialisées par le surnaturel.
    Ainsi, lorsque Buffy, fille de père divorcé et absent, voit avec méfiance sa mère se rapprocher d’un éventuel futur beau-père relativement douteux, ce dernier se trouve être au final un robot assassin (métaphore du beau-père violent). Autre exemple provenant du début de la série, lorsque à Sunnydale un proviseur se montre incapable d’autorité, il finit littéralement mangé (« tout cru ») par ses élèves (dans l'épisode 1.06 "The Pack"). Et quand Buffy est obligée de devenir vendeuse – un métier qu’ elle trouve très ennuyeux – celle-ci se retrouve coincée dans une boucle temporelle, où un client impossible à satisfaire viendra la harceler indéfiniment.
    Les thèmes abordés au cours des sept saisons sont beaucoup trop nombreux pour en faire une liste complète, mais on y trouve, entre autres, les premières expériences sexuelles, en particulier celles où le garçon se transforme en monstre (ou en vampire sans âme) après avoir eu ce qu’il voulait, les relations gay (le couple homosexuel réaliste composé par les magiciennes Willow et Tara), les responsabilités de l’âge adulte (s’occuper de sa sœur, trouver un travail, etc.), mais également la dépression.

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Car Whedon n’a pas peur d’aborder les passages les plus noirs de la vie des jeunes adultes. « Grandir, c’est aussi passer par des étapes un peu sales, malsaines » dit-il. Ainsi, lors de la cinquième saison, Buffy se montrant de plus en plus attirée vers la mort, elle s’éloigne petit à petit de ses amis, devient plus froide (une froideur déjà présente dans le personnage, que les scénaristes ont toujours volontairement entretenue), et commence à perdre toute envie. Et si, à l’issue de la saison, celle-ci se donne la mort pour sauver sa sœur, mais également l’humanité tout entière, son geste, tout en restant particulièrement héroïque, peut facilement être interprété comme la métaphore d’une tentative de suicide.
    Une tentative ayant échoué grâce à ses amis, qui l’ont ramenée à la vie au début de la saison 6. Mais là où une autre série aurait traité cette résurrection comme un événement ponctuel chargé de faire grimper l’audience, Whedon fait toujours en sorte que chaque événement de l’histoire ne soit pas sans conséquence (il n’y a jamais de statu-quo dans Buffy). De retour du paradis, notre héroïne tiendra alors intérieurement rancune à ses camarades de l’avoir ramenée et s’enfoncera plus profondément encore dans la dépression.
Une dépression traitée sous un angle réaliste. Pas avec des ronchonnements et des plaintes interminables comme cela aurait été traité dans la plupart des autres séries, mais plutôt le développement progressif et crédible des symptômes de cette affection. Ainsi, tout au long de la saison, la tueuse se sent comme déconnectée du monde qui l’entoure. Ce sentiment trouvera son expression métaphorique la plus nette dans l’épisode 6.17 "Normal Again", où Buffy se réveille dans un hôpital psychiatrique, où on lui explique que tous les évènements s’étant passés dans la série ne sont que le fruit de son imagination.
    Séduit par ce monde sans monstre (le nôtre), elle devra alors tuer ses amis « imaginaires » (Alex, Willow, et tout le Scooby Gang, comme on l’appelle dans la VO), pour pouvoir redevenir « normale à nouveau ». Mais au final, lorsque la mère de Buffy lui dira d’avoir confiance en elle, celle-ci commencera alors enfin à sortir de la dépression (et à se reconnecter à « sa » réalité) car, comme dans de nombreux cas, c’est le manque de confiance en soi qui est à l’origine de cette dépression, son sentiment d’être incapable de surmonter toutes les épreuves de la vie quotidienne (surtout depuis l’arrivée de sa sœur et la mort de sa mère).

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Si la fin de l’épisode semble indiquer que le monde de la série est bien fictif, c’est surtout pour souligner ce qu’est réellement Buffy the Vampire-Slayer : un show sur l’intériorité de ses personnages, mais également de la plupart des spectateurs. La série matérialise cette vie intérieure sous la forme d’éléments fantastiques (un peu à l’image d’un Silent Hill 2, où la ville crée des monstres et des personnages symbolisant les différents aspects de la psyché du héros). Et ceci en commençant par la base même de la série, car le personnage de la Tueuse est en réalité la matérialisation de ce que rêvent d’être les « outsiders », ceux qui se sentent rejetés lors de leurs études. « Je suis ce type que personne ne remarque. Mais ce qu’ils ignorent, c’est que je suis important. Je peux sauver le monde », nous dit Whedon.
    En fait, Buffy peut être considérée comme une série salutaire pour tous ceux qui souffrent de se sentir seuls et différents, car elle leur montre que leur cas est loin d’être unique. Cet élément est parfaitement illustré dans l’épisode de la troisième saison "Earshot", où Buffy acquiert provisoirement la capacité de lire les pensées des autres (donc leur intériorité), et empêche ainsi Jonathan - un futur personnage récurrent - de se suicider, parce qu’il en a assez d’être ce garçon insignifiant, dont la peine et la souffrance n’intéressent personne.
    Buffy lui explique alors, dans une scène écrite par Whedon (qui supervise la rédaction de chaque script), que si personne ne leur prête attention, c’est parce que les autres sont trop occupés à ressentir la même chose que lui. Et comme le souligne Whedon, « voir quelqu’un blessé, rejeté, et le voir surmonter cela pour devenir plus fort, me rend plus fort moi aussi ». Buffy the Vampire-Slayer est donc bien une série qui aide ses spectateurs à grandir mentalement, et cela sans les ménager.

    En effet, Whedon annonce très clairement la couleur (et le thème central de toute la série) par l’intermédiaire de Dawn, la petite sœur de Buffy, dans le formidable épisode musical de la saison six, "Once More With Feeling". Celle-ci y affirme que « la chose la plus difficile dans ce monde, c’est d’ y vivre ». Le message est clair : la vie n’est pas belle, elle est dure. Une difficulté renforcée par les peurs (souvent non exprimées) que chacun rencontre au gré de son existence. Par exemple, la peur qui fera reculer Alex au moment de son mariage, et qui trouve sa source dans le modèle très négatif que représentent ses parents.
    Buffy the Vampire-Slayer est donc une série hautement psychologique, presque psychanalytique. Une fiction qui traite de la pensée, donc de ce qui fait de nous des être isolés, seuls. « Nous sommes tous complètement seuls dans nos esprits, et j’ai été conscient de cela dès le tout début de ma vie ». Whedon illustre cet état de fait jusque dans la chanson de "Once More With Feeling", 'Where do we go from here ?' (« Comprenez que nous allons main dans la main, mais nous marchons seuls dans la peur » fait partie du refrain).
    Heureusement, même si elle traite, entre autres, des aspects les plus difficiles de l’existence, Buffy n’est pas pour autant une série déprimante. Même dans les moments les plus sombres, les auteurs n’oublient pas de faire cohabiter drame et humour. Ceux-ci ont bien entendu compris que lorsqu’un récit est bien écrit, mettre côte à côte noirceur et humour renforce les deux. « Les gens pensent souvent que lorsque c’est drôle, c’est forcément idiot », nous dit un Whedon qui offre ici les lettres de noblesse de la comédie télévisée.
    Il aborde de cette manière tous les sujets tabous dans les séries pour ados (viol, drogue, dépression,… ) et parle de choses graves et profondes sous le couvert de la comédie et des métaphores. De plus, Buffy the Vampire-Slayer étant également un détournement de série B et de tous les clichés qui en découlent (d’où le titre un peu ridicule de la série, afin de revendiquer cette appartenance), le rythme et l’action y demeurent extrêmement importants. Rock’n Roll and 'kung-fu style' en permanence.

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Mais surtout, l’une des grandes forces de Buffy the Vampire-Slayer, c’est qu’elle dispose régulièrement d’épisodes d’exception. D’une qualité très rarement atteinte à la télévision (et parfois même au cinéma), ces épisodes ont presque tous le point commun d’ être à la fois écrits et réalisés par Joss Whedon lui-même. Celui-ci nous y montre qu’ il n’a pas peur de jouer avec le format et de sortir des conventions télévisuelles habituelles. Son style de mise en scène est d’ailleurs assez remarquable dans ce contexte, car très réfléchi et en adéquation totale avec le propos.
    Ainsi, à l’instar de M.Night Shyamalan, il préfère utiliser les longs et complexes plans-séquences dans le but de rapprocher les spectateurs de la réalité des personnages et de ne pas créer une distance par le découpage. De plus, tout comme le réalisateur d’
Incassable, il offre à ses travaux plusieurs niveaux de lecture (toujours grâce aux métaphores). Ses références au niveau de la mise en scène passant par des cinéastes comme Stanley Kubrick, il est clair que le niveau de qualité recherché ici dépasse de loin celui de la grande majorité des productions télévisées.
    Parmi les épisodes phares, on peut citer, par exemple, l' ép. 4.10 "Hush", où les Gentlemen, des créatures à l’aspect réellement effrayant, font en sorte que personne ne puisse émettre un son à Sunnydale pendant les deux tiers de l’épisode. « Lorsque l’on arrête de parler, on commence à communiquer », tel est l’adage de Whedon dans "Hush", mais également dans "Once More with Feeling" (où les personnages expriment leurs pensées secrètes lors des chansons).
    Les grandes révélations sont donc ici données par le silence ou par le chant, ce qui est assez révélateur de l’aspect inhabituel de la série. De plus, la maîtrise de Whedon à la mise en scène lui permet d’incorporer à "Hush" des passages extrêmement drôles ou dramatiques, sans la moindre ligne de dialogue. Quant à "Once More with Feeling", il s’agit probablement de la première comédie (dramatique) musicale télévisée où chaque mot compte, où toutes les chansons font réellement avancer l’ histoire, tout en développant encore plus la psychologie des personnages.

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Car Buffy the Vampire-Slayer repose essentiellement sur une étude extraordinairement poussée de la psychologie de ses héros. Ceux-ci évoluent sans cesse, grandissent, font des erreurs (jamais sans conséquences), et portent les stigmates de leur vécu (Xander et sa recherche d’affection créée par l’absence de cette dernière dans ses relations parentales, etc.). L’excellent "Restless", qui clôt la saison quatre, en est une autre démonstration : par l’intermédiaire des rêves et de leur symbolique, les névroses et les peurs intimes des membres du Scooby-Gang nous y sont révélées. La série pousse l’analyse tellement loin, qu’elle offre parfois une véritable psychanalyse de ses protagonistes, mais aussi de nombreux spectateurs, qui retrouvent leur vécu dans tel ou tel personnage. Cette identification est permise par le réalisme hors du commun de la série.
    Bien sûr, certains doivent se dire « pardon, Buffy réaliste ? Avec ses vampires et ses monstres ? ». Mais il s’agit, bien entendu, du réalisme psychologique et émotionnel dont nous parlons ici. Si Whedon réussit aussi bien à faire en sorte que l’on se reconnaît très souvent dans les épreuves rencontrées par les personnages, c’est surtout parce que la série est, pour lui, un « exorcisme », une psychanalyse (justement) des ses propres traumatismes et frustrations personnels.
    Que ce soit sa scolarité difficile de jeune homme timide, n’ayant aucun succès avec les filles, la dépression qui en a résulté (et dont Buffy a hérité dans les saisons 5 et 6) ou encore la mort de certains de ses proches, tout cela se retrouve transposé dans le show. Buffy est donc, contrairement à l’idée générale, une série très personnelle, très intime. D’ailleurs, la perte de la mère de l’auteur a donné naissance à l’un des meilleurs épisodes de la série, voire de la télévision en général : "The Body".
    Un épisode sur le deuil et la mort dans ce qu’elle a de plus matérielle (d’où le titre, « le corps »), au réalisme saisissant, soutenu par une totale absence de musique et des plans séquences très longs, et à l’impact inégalé. Whedon y donne une véritable leçon de montage. Par exemple, lorsque Buffy voit arriver les secours, il s’ensuit un montage elliptique et très rapide où les infirmiers réaniment sa mère, l’amènent à l’hôpital, où elle se retrouve vite totalement guérie et entourée de ses deux filles soulagées. Mais Whedon coupe brusquement cette scène heureuse en plein milieu d’un dialogue, par un plan sur le visage blanc de sa mère toujours morte sur le divan (tout cela s’étant bien entendu déroulé dans l‘esprit de Buffy). Traumatisant.

    Peut-être un peu trop pour certains spectateurs, qui se sont plaints du ton de plus en plus sombre de la série au fil du temps, ainsi que de son aspect moins métaphorique (et donc plus cru). Mais comme le souligne Whedon, « grandir, c’est également perdre un peu de ces métaphores. La vie devient cette chose plus terre-à-terre. Les nécessités quotidiennes dévorent petit à petit les métaphores ». Mais celles-ci ne disparaissent pas complètement de la série, mais prennent une autre nature (par exemple, lorsque Buffy et Spike ont leur première relation sexuelle dans une maison qui s’écroule suite à leur affrontement - une maison qui représente la vie de Buffy, qui s’écroule elle aussi tout au long de la saison).
    Concernant ceux qui aimeraient que la série redevienne plus joyeuse, l’auteur insiste sur le fait qu’ il souhaite « donner au public ce dont il a besoin, et non ce qu’il veut ». Alors que de nos jours, on ne cesse de caresser le spectateur dans le sens du poil, au risque de s’abaisser au niveau le plus bas (voir, entre autres, la TV-réalité), Buffy the Vampire-Slayer n’a jamais peur de « blesser » ses fans. Les scénaristes n’hésitent pas à faire disparaître de manière brutale des personnages populaires, afin de rendre la série totalement imprévisible.
    Imprévisibilité accentuée par le constant retournement des clichés de la série B, dont Buffy est, comme dit précédemment, un détournement. Et ceci en commençant par l’héroïne, une petite blonde californienne, dont la fonction principale, dans ce style de fiction, serait d’être jolie et de se faire secourir par le héros musclé de service.
    Or, c’est cette bimbo qui est ici l’héroïne et qui sauve constamment le type musclé (Angel, qui tient clairement le rôle habituellement laissé à la fille dans Buffy, mais pas dans sa propre série). Whedon a toujours été un féministe et son travail le montre, sans jamais tomber dans la caricature. « J’ai été élevé par une femme forte, indépendante et très drôle. Je voulais avoir une héroïne comme cela ».

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Mais la liste des qualités de Buffy the Vampire-Slayer ne s’arrête pas là. En effet, la série est également réputée pour ses dialogues très travaillés, qui sonnent vrai, tout en étant souvent extrêmement drôles, mordants et ponctués de répliques cultes. Ainsi, les références à la pop-culture parcourent régulièrement les discussions des héros (y compris sur les autres séries TV) et participent à la crédibilité des dialogues. Autre qualité, les scénaristes font en sorte de ne jamais refaire la même chose de saison en saison.
A propos de cette absence de statu quo, le personnage de Dawn, la sœur de Buffy apparaissant brusquement au début de la saison 5 sans aucune explication, et dont le premier véritable épisode est perçu de son point de vue, est l’illustration parfaite du culot des scénaristes. Mais étant donné que Whedon planifie son récit bien à l’avance, ceux-ci savaient parfaitement où ils allaient (des allusions à l’arrivée de Dawn étaient déjà présentes dans la troisième saison).
    Encore un bon point : Buffy n’est pas soumise à l’habituelle morale judéo-chrétienne des séries télévisées américaines, en particulier concernant le sexe, qui n’y est pas diabolisé. Au contraire, c’est un thème très important de la série. A l’inverse de Smallville ou Roswell, pour ne citer que deux exemples parmi tant d’autres, les personnages grandissent et peuvent connaître, comme dans la vraie vie, des relations malsaines ou uniquement basées sur les rapports physiques.
    Toujours au niveau des points forts, des références culturelles et littéraires parsèment les épisodes. Whedon y transcrit son amour pour Shakespeare de manière fort subtile. Buffy est donc également une série dégageant une certaine poésie et une véritable sensibilité (dans le sens de ressentir les choses, pas de sensiblerie). Mieux encore, on peut affirmer que Buffy the Vampire-Slayer n’a quasiment aucun mauvais épisode (quelle autre série pourrait en dire autant ?). Il y a toujours au moins un élément extrêmement juste, drôle ou pertinent dans chacun d’entre eux.

    Si au départ, Whedon souhaitait faire du cinéma en ayant du succès tout en gardant son intégrité artistique, c’est à la télévision qu’il y est parvenu. « Je préfère faire un show que 100 personnes ont besoin de regarder, plutôt qu’un que 1 000 veulent regarder ». On n’a pas de mal à le croire, tant Buffy the Vampire-Slayer se pose en véritable chef-d’œuvre télévisuel. Un chef-d’œuvre dont la richesse est bien trop grande pour en faire le tour complet ici.
    Mais c’est avant tout une série profonde et psychologique, une analyse des peurs et émotions humaines, en particulier lors du passage à l’âge adulte. Une œuvre faite avec passion (l’équipe ne compte pas les heures et appelle la série « Buffy The Week-end Slayer »), au sens multiple, et non pas un simple divertissement. Quant aux anti-Buffy, dont le seul argument se résume souvent à ironiser sur le titre (Bouffy ? Pouffy ?... ), Sarah Michelle Gellar leur a répondu que ceux-ci « sont ignorants et veulent le rester ». Qu’ajouter de plus ?

David Dunn